Charles Lancar - Ecrivain
 
 
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  Extrait...  
     
 
Vito :

(...) « Il n’y a pas de fatalité à la médiocrité », nous répétait inlassablement, à Tunis, notre professeur d’atelier lorsqu’il nous rendait une pièce de plomberie mal façonnée. Ce principe, je le prononce chaque matin quand, après une heure de ménage pour remplacer Mme Tallandier, malade, je m’installe dans un bureau pour étudier jusqu’à l’arrivée de Jeannine, la standardiste. Je l’aime bien, Mme Tallandier, qui préfère mourir « usée plutôt que rouillée ». A soixante-douze ans, elle continue à traquer la poussière et à frotter les parquets comme si l’œil de Dieu était fixé sur son travail. Son visage, tout en rides et craquelures, a pris avec l’âge la couleur de la cire et ses mains, quand elle ne les active pas, sont saisies de tremblements. Par fidélité à sa jeunesse, elle coiffe ses cheveux cendrés en chignon. Habituellement, elle m’accueille en blouse et espadrilles, avec son éternel sourire éreinté : « Vous en avez du courage, monsieur Victor, de vous lever si tôt. » Un instant, elle me regarde déballer mes livres avec ce respect qu’ont les vieilles personnes pour les choses du savoir dont elles ont été privées, puis retourne à sa tâche en dodelinant de la tête. Et je ne sais alors si elle s’apitoie sur moi ou sur elle-même. N’était la crainte de paraître ridicule, je lui baiserais les mains ; je la pousserais ensuite vers un fauteuil, face à la fenêtre et je lui dirais :
« Reposez-vous madame Tallandier, voyez le printemps est là. »
(...)